Histoire des jardins : des origines persanes aux jardins remarquables

Les jardins sont des poèmes sur Terre, des espaces où l’Homme rêve et construit  ses croyances et son lien avec la nature. Des oasis persanes aux jardins remarquables d’aujourd’hui, chaque jardin reflète son époque, ses influences et ses aspirations, chaque fleur porte une histoire. Partons pour une promenade dans le temps à travers ces mondes végétaux. Explorons leurs origines, leurs caractéristiques et leurs rôles culturels.

Jardins persans : le paradis terrestre

Tout commence avec les jardins persans, nés dans l’aridité de la Mésopotamie antique, dès le IIIe millénaire av. J.-C. Ces pairidaeza – des enclos dont le nom signifie « paradis » – sont des oasis où l’eau, rare et précieuse, fait fleurir rosiers, grenadiers et cyprès.

Leur structure, le chahar bagh, divise l’espace en quatre quadrants autour d’un bassin central, symbolisant l’harmonie originelle. Influencés par les mythes du paradis terrestre, ces jardins étaient des lieux de poésie et de pouvoir. Les roses de Damas, grenadiers et cyprès prospèrent grâce à des canaux ingénieux, comme à Bagh-e Fin en Iran. Leur rôle culturel est celui d’un refuge spirituel, une idée qui influencera les jardins médiévaux européens et moghols indiens.

Lien : le jardin fin Bagh-e Fin à Kashan en Iran. Un chef-d’œuvre persan classé UNESCO

Les jardins chinois : l’harmonie taoïste

Parallèlement, sous la dynastie Han (IIe siècle av. J.-C.), les jardins chinois incarnent l’harmonie taoïste. À Suzhou le jardin de l’Humble administrateur, collines artificielles, étangs sinueux et pavillons délicats recréent des paysages naturels.

Influencés par les montagnes et rivières, ils privilégient l’irrégularité, invitant à la contemplation. Le lotus, symbole de pureté, flotte sur leurs eaux, incarnant une quête d’équilibre. Leur rôle est philosophique : un espace de méditation sur l’union entre l’homme et le Tao, une influence qui se retrouve dans les jardins japonais.

Lien : Jardin de l’Humble Administrateur, Suzhou – Un jardin classique chinois UNESCO

Jardins japonais : la beauté de l’éphémère

Vers le VIIIe siècle, les jardins japonais s’épanouissent, portés par le bouddhisme zen, le shintoïsme et les jardins chinois. À Ryoan-ji, à Kyoto, rochers et sable ratissé composent des méditations visuelles, tandis que les cerisiers en fleur célèbrent l’impermanence et le renouveau perpétuel. Chaque élément – une pierre, un étang – invite à l’introspection. Leur rôle est spirituel, offrant un espace pour contempler l’impermanence, en même temps que le renouveau de la vie.

Lien : Saiho-ji, Kyoto – Le jardin des mousses, emblème japonais

Jardins Médiévaux : Refuges Sacrés

En Europe, entre le Ve et le XVe siècle, les jardins médiévaux naissent dans un monde troublé. Influencés par les jardins persans via les croisades et les textes sacrés, ces hortus conclusus sont des refuges clos où l’on cultive les herbes médicinales, les légumes et les fleurs, comme le lys, symbole de pureté.

Dans les monastères, ils soignent le corps et l’âme ; dans les châteaux, ils accueillent jeux et amours. Leur rôle culturel mêle utilité et spiritualité, évoquant un paradis terrestre dans une époque d’incertitude.

Lien : Le jardin médiéval d’Uzès, jardin botanique d’inspiration médiévale

Jardins Moghols : Opulence et Spiritualité

Au XVIe siècle, les jardins moghols en Inde reprennent le chahar bagh persan, mais avec une opulence unique. Au Taj Mahal, fontaines, pavillons de marbre et parterres de jasmins et de roses célèbrent le pouvoir impérial et l’aspiration au divin. Influencés par l’Islam et la culture persane, ils intègrent des plantes locales comme le lotus ou le manguier. Leur rôle culturel est à la fois politique et spirituel, faisant de ces jardins des lieux de prestige et de repos.

Lien : Les jardins du Taj Mahal, Un chef-d’œuvre moghol classé UNESCO

Jardins à la française : L’ordre royal

Au XVIIe siècle, le jardin à la française impose l’ordre en Europe. Inspiré par les jardins italiens de la Renaissance, eux-mêmes héritiers des modèles persans, il atteint son apogée avec André Le Nôtre à Versailles. Parterres de broderies, bassins géométriques et allées rectilignes plient la nature à la volonté royale. Leur rôle culturel est politique : un théâtre où chaque rosier taillé glorifie la monarchie, reflétant l’absolutisme du Roi-Soleil.

Lien : Jardins de Versailles – L’archétype du jardin classique.

Jardins à l’anglaise : La liberté romantique

Au XVIIIe siècle, le jardin à l’anglaise rompt avec cette rigidité. Influencé par les jardins chinois et les peintures de paysages de Claude Lorrain, il célèbre une nature idéalisée, presque romanesque.

À Stourhead, pelouses vallonnées, rivières sinueuses et éléments construits – temples ou grottes artificiels – composent des tableaux vivants. Leur rôle culturel incarne l’esprit des Lumières : une quête de liberté et d’émotion, portée par des fleurs comme la primevère ou la rose.

Lien : Stourhead, Angleterre – Un chef-d’œuvre paysager.

Jardins remarquables : écologie et créativité

Aujourd’hui, les jardins contemporains redessinent notre lien à la nature à travers les jardins remarquables, des espaces reconnus pour leur créativité et leur engagement écologique. Ces jardins mêlent biodiversité, art et sensorialité, comme au Jardin des Plantes à Paris, où orchidées rares, roses modernes et graminées s’épanouissent dans des parterres savamment orchestrés. Influencés par les mouvements écologistes et les jardins savants de la Renaissance, ils conjuguent science et esthétique. Des haies de saules tressés, des bassins de nénuphars et des collections de plantes médicinales évoquent les héritages médiévaux, tandis que des installations modernes, comme des sculptures végétales, invitent à une flânerie polysensorielle. Une anecdote raconte que les jardiniers du Jardin des Plantes collaborent avec des botanistes pour préserver des espèces menacées, faisant de ces espaces des laboratoires vivants. Leur rôle culturel est de connecter l’homme à la nature, tout en célébrant la diversité et la durabilité.

Lien : Jardin des Plantes, Paris – Un jardin remarquable alliant science et beauté.

En chemin

Des oasis persanes aux jardins communautaires, chaque jardin est un miroir de son temps, chaque fleur un symbole universel. Cette promenade à travers les siècles révèle comment la nature, façonnée par l’homme, raconte des histoires d’ordre, de liberté, de spiritualité et de résilience.

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